Votre cerveau ne veut pas que vous pensiez à la mort
Sauf si vous avez un certain âge, êtes atteint d’une maladie mortelle ou portez une faux et une robe noire, vous ne pensez probablement pas beaucoup à la mort. Même après la perte d’un être cher, les gens pensent plus à la vie qu’à la mort. Certains pensent peut-être que c’est un signe de manque d’attention, mais il se peut que les humains ne soient pas capables de penser autrement. Une nouvelle étude a démontré que le cerveau humain semble être câblé pour éviter ou faire dévier les pensées liées à la mort. Est-ceun mécanisme d’auto-défense dont nous avons hérité de nos ancêtres préhistoriques ou un élément crucial sur la voie de la longévité ou même de l’immortalité ? « Le cerveau n’accepte pas que nous soyons liés à la mort.
Nous possédons ce mécanisme primal qui signifie que lorsque le cerveau reçoit des informations qui nous lient à la mort, quelque chose nous dit qu’elles ne sont pas fiables, et que nous ne devrions donc pas y croire. Nous ne pouvons pas nier de façon rationnelle que nous mourrons, mais nous y pensons plutôt comme quelque chose qui arrive aux autres. » Dans une interview accordée au journal The Guardian (du 19 octobre 2019) , YairDor – Ziderman, étudiant diplômé de l’Université de Bar-Ilan en Israël au Centre de recherche multidisciplinaire sur le cerveau de Gonda, a donné une explication simple des résultats de son étude, « Prediction-based neural mechanisms for shielding the self from existential threat » (« Mécanismes neuronaux fondés sur la prédiction pour se protéger de la menace existentielle »), publiée au mois de novembre dernier dans la revue NeuroImage.
Pour tester ses théories sur l’évitement de la mort humaine, Dor-Ziderman a relié des volontaires à des contrôleurs cérébraux pendant qu’ils observaient des visages, y compris la leur, sur un écran avec au-dessus des mots parfois liés à la mort. Lorsque les sujets voyaient leur propre visage avec des mots comme « funérailles » ou « enterrement », le moniteur enregistrait un arrêt complet des réponses qui apparaissaient lorsque les mêmes mots apparaissaient avec d’autres visages. « Cela suggère que nous nous protégeons des menaces existentielles, ou de l’idée que nous allons mourir, en nous fermant aux prédictions qui nous concernent ou en catégorisant les informations comme concernant d’autres personnes plutôt que nous-mêmes. » Avi Goldstein, auteur principal de l’étude, répète que cette aversion pour la mort est strictement envers la notre et non celle des autres.
Cependant, les humains modernes sont beaucoup plus réticents à faire face à la mort de leur entourage que ce n’était le cas il y a à peine une génération. Nous plaçons des malades dans des hôpitaux, des personnes âgées dans des maisons de retraite et des mourants dans des hospices. Nos restes et nos funérailles sont traités par des professionnels plutôt que par notre famille à la maison. La mort arrive rapidement à la télévision et au cinéma, et les seuls morts que nous voyons pendant de longues périodes sont les zombies (qui de toutes les façons n’existent pas, donc ils ne nous font pas peur). Cette aversion pour notre propre mort est-elle bonne ou mauvaise ? Bien que la plupart d’entre nous évitent le sujet, ceux qui vivent des expériences proches de la mort semblent prendre plaisir à en parler. Peut-être savent-ils vraiment quelque chose que nous ignorons. Peut-être que l’EMI désactive les cellules d’aversion envers la mort du cerveau. Serait-ce ce que certaines drogues psychédéliques font également ? « Je suis toujours soulagé quand j’entends quelqu’un prononcer un éloge funèbre et je réalise que je l’écoute. » – George Carlin.
Cet article est issu du magazine Science et au-delà numéro 13. Vous pouvez découvrir tous nos magazines numériques sur notre site officiel